Discussion jeudi 21 novembre 2024 à 19h :
Une critique queer et nihiliste de la civilisation, autour de Bædan, « contre le cauchemar du genre »
Voilà quelques mois que le numéro 2 de la revue nihiliste Bædan a été traduit en français, dix ans après sa sortie, et il résonne avec des désirs d’insurrection contre le genre. Sa publication est aussi l’occasion de porter enfin une voix contre les tendances assimilationnistes des milieux queer francophones qui nous bassinent de leurs politiques identitaires.
Sous des airs parfois abstraits, Bædan – comme d’autres anarchistes – pointe les limites d’une critique de l’État ou du capitalisme en amenant la question du genre au cœur de la réflexion sur les fondements de la domestication. Pour les auteurices « la domestication c’est le genre » (page 46), processus dans lequel tout.e humain.e est pris.e de force à chaque instant, à travers le travail, le contrôle des corps, l’organisation des rapports sociaux ou encore la soumission à l’ordre et l’internalisation des contraintes qui lui sont imposées.
Mais face à ce système qui paraît s’étendre à l’infini et jusqu’au plus profond de nous-même, comment penser un monde libéré de la contrainte du genre ?
Pour Bædan, pas de destinée révolutionnaire, ni de passé « sauvage » auquel se référer, la révolte contre le genre – donc contre le monde – nous plonge tout droit dans l’inconnu. D’ici il n’y aurait rien à récupérer, le genre s’immisce partout et tout est à détruire, afin que s’ouvrent des possibles, car la révolte est aussi une manière d’être vivant.e.
Si on pourra lire certains passages propices à la discussion, le livre est aussi un prétexte pour ouvrir le débat sur l’alliance des critiques queer et anarchistes dans la lutte contre ce monde. Quelles perspectives Bædan et d’autres écrits et mouvances « queer »1– telles que BashBack – pourraient émerger ?
Des exemplaires de la revue sont dispos à la bibliothèque, on met aussi ici quelques quelques extraits :
« Une queerness sauvage doit émerger à travers la lutte du corps contre sa capture. »
« Une queerness sauvage doit apparaître comme une folie furieuse (wildness), comme un effort pour incarner le chaos du monde, tout en refusant l’ordre qui est toujours imposé à ce chaos. »
« Une queerness sauvage doit étendre cet effet à toute la vie. » (pp. 134 à 137)
1. On a choisi d’utiliser le mot queer comme il l’était aux États-Unis au moment de l’écriture de la revue, faute d’une traduction satisfaisante. On est bien conscient.e qu’aujourd’hui il a une connotation libérale en français qui induit parfois un sens exactement contraire avec la manière dont il est utilisé ici, comme une tendance à la destruction du genre, plutôt qu’à la normalisation de sa multiplicité.
Lire la suite du programme : 30 novembre, 14 décembre, 21 décembre